top of page
Photo du rédacteurKarin

Journal d'une ex-nano-influenceuse

Vendredi 30 septembre

8h32

Bim!

En voulant ouvrir Instagram, je me heurte à un message qui me dit que mon compte a été bloqué temporairement pour un problème de hameçonnage. Si je veux y accéder, il faut entrer un code que j’ai reçu par mail. Sauf que cette adresse correspond à une boîte que j’avais créée chez Romandie.com qui n’héberge plus depuis 3 ans.

Je n’ai pourtant rien fait pour mériter ça, ô Grand Dieu des réseaux sociaux! Mes dernières publications remontaient déjà à quelques jours où je militais par story contre la réforme AVS21 avec un minimum d’arguments. Le matin même j’avais mis deux, trois smileys à des copains et aimé une vingtaine d’images dépourvues de seins et de culs rebondis. Alors oui, mon Père, si je dois tout vous dire, réalisant que j’avais perdu deux abonnés, j’ai ouvert une application qui me permet de voir de qui il s’agit. Non, je ne pèche pas souvent par orgueil, mais je déteste que l’on vienne me hameçonner, justement. Alors je ne vous mentirai pas en vous disant que cela faisait longtemps que je n’avais pas ouvert ce truc et que pile après, paf, compte bloqué, vilaine fille!

Je ne vois que cela.

Mais maintenant, comment je fais pour récupérer mon compte via un mail obsolète? Il existe toujours, il est là, à un clic mais je ne peux plus rien faire, lire mes messages, gérer mes publications, mettre une connerie en story. Et il va bientôt perdre des abonnés: d'aucuns ont peur que je me sois fait pirater car les virus se propagent, ça fait trois ans qu’on vous le dit. 😱😷



11h47

Je tourne en rond, on me tourne en bourrique. Le seul formulaire auquel j’accède sur la plateforme ne veut pas s’envoyer car mon compte existe toujours. D’après les forums, le problème est connu. Mais là-haut on s’en tape, plus occupés à brasser des billets, balancer de la pub et mettre des alertes sous une publication dès qu’elle contient des mots qui heurtent les algorithmes. Je ne dirai pas que j’ai l’impression qu’on m’a enlevé un bras, ce serait un poil exagéré, mais si peu. Il ne me reste que Facebook pour me défouler. Facebook où je ne suis pas bloquée, pourtant mes comptes sont liés, mais ô merci mon Dieu de votre mansuétude, le contraire m’aurait limite arrangée. J’y trouve cependant quelques amis compatissants qui me donnent des conseils avisés mais avec lesquels je reviens à mon mail fantôme. Et chez Meta, donc, aucun support, même pas une hotline avec une voix électronique qui te dit: « Pour le français, tapez 34. »

Ça ne serait certes pas si déprimant si on n’était pas à un jour du challenge Inktober, défi qui se déroule depuis 2009 principalement sur Instagram. Chaque jour du mois d’octobre, les participants publient un dessin à l’encre sur des mots donnés qui peuvent être aussi variés et obscurs que grincheux, salé et tatou. Comme l’année dernière, je compte participer en n’entrant pas forcément dans les codes et en étant parfois complètement à côté de la plaque.


Quelques Inktober de 2021 (le thème apparaît en survolant la photo avec le mulot)(normalement)

Exemples de publications sujettes à se coller une bannière d'avertissement en Suisse et dans le monde, avec la première version de "ouvert" et la version définitive de "corbeau".



Samedi 1er octobre

9h42

Ça y est, je craque.



Je ne peux pas rester plus longtemps avec ma gargouille/crotte de nez sous le bras. J'ouvre un compte parallèle et m'apprête à aller repêcher mes abonnés chez mon autre moi. Et puis, c’est peut-être pas si compliqué et moche que ça de rajouter un 2 au marker sur mes cartes de visite.


10h12

Instagram m’informe qu’il décèle trop d’activité de ma part et qu’on risque de bloquer mon compte.

Soit je pleure, soit je vais aux châtaignes.



Mardi 4 octobre

7h17

Allez, comme je me suis retenue de ressayer jusqu’alors, juste pour voir où cela en est…



Soit je pleure, soit je vais marcher.


Inktober 2022, jour 4, coquille


Mercredi 5 octobre

9h24

Parfois, il suffit d’ouvrir le courrier pour avoir rempli son sac de bonne humeur quotidienne.

Swisscom, l’entreprise qui nous rabâche les oreilles depuis des mois avec ses abonnements climatiquement neutres m’envoie une grosse enveloppe avec une lettre, une brochure et une carte-réponse. Ainsi, je pourrais recevoir gratuitement le guide des médias numériques consacré aux influenceur-euse-s. Avec des accroches aussi lamentables que:

« Maman, je vais devenir influenceur-euse »

« Quand les mots deviennent une arme »

« Idéaux de beauté »


On dit merci qui? Merci, Swisscom. En feuilletant toutefois cette bouse pour me faire une idée avant de m’en servir pour allumer le feu parce qu’on économise le mazout (quant à savoir si on se douche à deux, ça ne vous regarde pas), j’ai appris qu’avec mes 1300 abonnés j’étais une nano-influenceuse.

R.I.P.

Soit je pleure, soit je me remets à mes stylos et tente de griffonner un truc pour le 26: EGO.

Comments


bottom of page